Comme Elle Vient

Réveillée plus tôt aujourd'hui car couchée plus tôt hier, profitons-en pour écrire un peu plus longuement ici. Ce week-end fut assez lourd d'un point de vue professionnel, trois jours de festivités en nos murs. Les autorisations avaient été officiellement demandées et accordées, il n'y a pas eu de problèmes de ce côté là. Je me suis surprise à penser à un moment, tout en tirant des kilomètres de bières, que continuer à faire cela, ailleurs et sans voisin, et pas tous les jours, ne serait pas déplaisant. Concerts en fin de semaine, en périphérie de la civilisation et de ses fâcheries ... Je pense aussi qu'avoir de nouveau plus que doublé la dose de mes antidépresseurs n'a pas fait de mal. Bonnes résolutions des six derniers mois parties en fumées, substances chimiques qui m'aident à supporter la réalité.

Dans le même temps, je continue à réfléchir. J'ai beaucoup parlé avec D. et avec B. ces derniers jours. Fait réagir l'un sur ce que disait l'autre. Le premier pensait qu'en fait le second n'est pas coupé de ses sentiments en général, mais de ceux qui me concernent en particulier, et ne l'assume pas. Qu'il s'agit d'une vrai rupture, pas d'une pause, mais d'une fin de relation. B. me dit qu'il en a beaucoup discuté avec sa psy, que cela faisait partie de ses doutes, de ses craintes, mais qu'ils pensent tous les deux que ce n'est pas le cas, et qu'il est actuellement sur la bonne voie. Il est beaucoup plus jaloux et inquiet que prévu, a beaucoup de mal avec la venue en son territoire d'un autre mâle alpha. Lui pense que si je disais à D. qu'il n'y a pas de possibilité de futur, ce dernier voudrait s'arrêter là, que c'est la possibilité d'un avenir commun, même infime - les "5%" -, qui le fait continuer. Question posée, B. avait raison. Je me rends compte que telles que sont les choses à l'heure actuelle, le flou qu'aucune paire de lunettes ne réussit à guérir, est un obstacle à ma nouvelle histoire. J'aimerais que nous ne fassions que nous amuser pour l'instant, et qu'il soit temps de réfléchir, de tomber amoureux peut-être, une fois que mon calendrier est clarifié. Visiblement la Suisse a pris de l'avance sur la France, cette solution merveilleuse n'est pas à l'ordre du jour.

Pourtant ...

... J'ai reçu un mail hier de D., des "devoirs". Il y a un mois, nous nous parlions en ligne, il était juste quelqu'un parmi les autres, plutôt sympathique, intelligent. Une propension au lol un peu agaçante. Ce qui a scellé la tournure de notre relation, sans qu'il s'en doute je pense (ou peut-être que si ?), c'est ses premiers devoirs. Une fois partie me coucher, il m'a envoyé un texte qui répondait à mes provocations de fin de discussion ; le texte que j'ai mentionné dans le post "Note en bas de page" du 20/08/2008. Il laissait entrevoir des fantasmes communs, et m'autorisait surtout à les lire noir sur blanc, ce que tout le monde n'aurait pas fait. Son nouveau texte est beaucoup plus long, plus sincère aussi (l'autre l'était déjà). Il me trouble (physiquement) et me touche en même temps. La confiance qu'il a choisi de me donner. Je sais que je suis une sorte de déclencheur pour lui, l'un des facteurs humains qui interviennent dans sa grande période de restructuration personnelle. J'ai en face de moi quelqu'un qui partage des morceaux de ma libido, peut-être plus que B. Ses mots résonnent en moi, je continue de raisonner. Trop d'inconnues dans ma vie, la date de ma libération professionnelle, la date du retour de B. sur Terre, la concrétisation possible ou non d'une vie commune avec D. (il ne suffit pas d'aimer ou de penser aimer pour pouvoir créer un couple viable).

On ne construit pas une relation que sur le sexe. Mais c'est un ingrédient important. Mais ce n'est pas l'unique. Je sais qu'avec B., il y a des chances que je me réalise enfin, qu'il porte ma mutation finale vers ce que je suis sensée être. Est-ce que D. peut m'offrir cela ? Il le pense, en tout cas il le dit, mais a-t-il seulement une idée du poids de la tâche ? Je sais ce que je perds avec l'ancien, je ne sais pas ce que je gagne avec le nouveau. Considération qui semble triviale, mais c'est aussi une partie du problème. Et puis mes sentiments. Qu'est ce que je ressens, au fond ? Vers qui mes bras, mon coeur, mon corps vont ? Y'a t'il quelqu'un avec qui je veux partager mon déambulateur ? Un peu biaisé de lâcher la proie pour l'ombre. Mais si je revenais avec B. et que notre couple reparte comme avant, c'est-à-dire avec tous les défauts de la version 1.0 ? Manque d'échanges, manque d'indépendance, manque de cul ? Mais si je partais avec D. pour disparaître de nouveau, me noyer dans une vie qui ne me convient pas, mais dont je me contente ?

Je suis en train de me dire que je devrais tout mettre en pause, laisser mijoter un peu, voir ce qui reste dans la casserole à la fin, quand je peux soulever le couvercle, finalement.

Love is like quicksilver in the hand. Leave the fingers open and it stays. Clutch it, and it darts away.
~ Dorothy Parker